Prix carbone : Comprendre et Anticiper les Impacts
Découvrez tout sur le prix carbone, son impact sur l'économie et l'environnement. Anticipez ses changements et comprenez les facteurs de formation du prix.
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Les quotas de CO2 de l’UE ont démontré leur efficacité à réduire les émissions rapidement et massivement, 41% de réduction depuis 2005. Cette efficacité repose sur trois mécanismes: effet de prix, de rétention, et de suppression. On détaille ces mécanismes dans cet article.
L’UE a mis en place un package de politiques afin d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2050, c’est “l’European green deal” ou “Pacte vert pour le climat”.
Au sein de ces lois, on trouve “Fit for 55” ou “Ajustement à l’objectif 55” qui fixe une réduction des émissions de 55% par rapport aux niveaux de 1990 d’ici 2030.
Les objectifs de neutralité carbone en 2050 et réduction des émissions de 55% d’ici 2030 reposent tous deux sur le succès du marché des quotas de CO2.
Le système d'échange de quotas d’émission est l’élément central de la politique de l'UE dans la lutte contre le changement climatique depuis 2005. Les quotas de CO2 ont su se montrer juste et efficace pour inverser la tendance des émissions de CO2 à grande échelle. Ils sont crédités d’une baisse des émissions de 41% depuis 2005.
Le réchauffement climatique est causé par les émissions massives de gaz à effet de serre, notamment du dioxyde de carbone (CO2) et du méthane, produit des activités humaines. Ces émissions anthropiques, proviennent en grande partie de la combustion de combustibles fossiles (gaz, charbon, pétrole), mais aussi d'autres sources telles que l'élevage, les réfrigérants ou les engrais.
Le rejet de ces gaz à effet de serre réchauffe la planète, entraînant des dommages considérables pour les sociétés et les écosystèmes. Ces dommages sont des externalités négatives, les écosystèmes et les sociétés en supportent les coûts, et non les pollueurs.
Depuis le début du XXe siècle, on sait que le meilleur moyen de gérer les externalités négatives est de transférer les coûts. Les émetteurs doivent payer pour les dommages qu’ils ont causés. C'est ce qu'a démontré l'économiste Arthur Pigou.
La théorie de Pigou a été confirmée par l'expérience, à de multiples reprises. Dans un premier temps aux Etats-Unis au début des années 1990.
Pendant les années 1990, les gouvernements du monde entier ont pris conscience que les activités humaines avaient un impact sur le climat et qu'il était essentiel d'inverser la courbe des émissions de gaz à effet de serre pour maintenir un monde viable. En 1992, 154 États ont signé la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), dont l'objectif était la « stabilisation de la concentration des gaz à effet de serre dans l'atmosphère » (article 2 de la CCNUCC). C'est dans la CCNUCC qu’a été instituée la Conférence des Parties, ou COP, qui se réunit chaque année depuis.
Les premières mesures concrètes qui émergent de cette prise de conscience prennent forment dans le protocole de kyoto signé en 1997. Ce protocole préconise la mise en place de marchés de permis d’émissions.
8 ans plus tard, en 2005, l'Union européenne met en place un marché sur ce modèle entre installations industrielles : “Le système d'échange de quotas d'émission de l'UE” ou “emission trading scheme EU ETS” . Au fil du temps, il est devenu le marché du carbone le plus important, le plus mature et le plus sophistiqué au niveau mondial, et inspire de nombreuses autres juridictions.
Le marché des quotas carbone européens a connu de nombreuses réformes, améliorations et modifications pour être aujourd'hui la pièce maîtresse de la politique climatique de l'UE.
En 2021, la Commission européenne a présenté le paquet législatif "Fit for 55" afin que l'UE réduise ses émissions nettes de gaz à effet de serre d'au moins 55 % d'ici 2030, par rapport à 1990. Ce paquet couvre tous les secteurs de l'économie et comprend de multiples mesures, dont plusieurs sont déjà adoptées. Il réaffirme le marché des permis carbone comme principal outil de réduction des émissions.
C’est la réponse collective de l'Europe au besoin pressant d'une transition rapide et socialement acceptable vers la neutralité carbone d'ici 2050. Ses dispositions visent non seulement à garantir la réduction des émissions, mais aussi à renforcer l'innovation et la compétitivité des industries de l'UE.
Le nouveau paquet de mesures rend le marché de quotas de CO2 encore plus ambitieux :
Pour que l'Europe dans son ensemble atteigne une réduction de 55 %, les industries couvertes par le le marché des permis carbone doivent réduire leurs émissions de 62 %.
Lancé en 2005, on a désormais près de vingt ans de recul sur ce marché ce qui permet d'évaluer son efficacité ainsi que son soutien politique. De 1990 à 2021, l'UE-27 a réalisé une réduction de 30 % de ses émissions nettes de gaz à effet de serre, malgré de nombreux défis politiques, économiques et sociaux. Les données de 2022 suggèrent une réduction supplémentaire de 1,9 %, contribuant ainsi à l'objectif global de 48 % de diminution d'ici 2030 par rapport aux niveaux de 1990.
Entre 2005 et 2023, les émissions provenant des installations relevant du marché des quotas de CO2 ont connu une baisse significative des émissions de 41%. Cette diminution est principalement liée à la décarbonisation du secteur de l'électricité, où le coût des technologies de réduction des émissions est le plus faible. À mesure que le nombre de quotas disponibles diminue et que leur prix augmente, les autres secteurs auront une forte incitation économique à réduire leurs émissions.
Une étude de 2020 a examiné l'efficacité du marché des permis de CO2 pour la réduction des émissions. Ces chercheurs britanniques ont estimé que le marché des permis carbone est responsable d’une diminution de plus de 1,2 milliard de tonnes de CO2 entre 2008 et 2016 par rapport à un scénario sans le marché des quotas. Depuis lors, les quotas de CO2 européen n'ont cessé de mûrir et d'évoluer, en particulier depuis 2018 : au cours des 6 dernières années, le prix des quotas de l'UE a été multiplié par 10. Des prix plus élevés signifient que davantage de solutions et de technologies à faible émission de carbone deviennent plus compétitives sur le plan économique que de payer des quotas carbone. Par conséquent, l'impact environnemental du marché des quotas de CO2 est directement lié à ses niveaux de prix et a encore beaucoup de potentiel devant lui.
Le plafond du marché des permis carbone est la limite du nombre de quotas d'émission de l'Union européenne délivrés chaque année par la Commission européenne. Il représente l'offre sur le marché. Chaque quota équivaut à une tonne de CO2.
Les entreprises doivent détenir autant de quotas que de tonnes de CO2 émises au cours de l'année et restituer ces quotas à l'UE en fin d'année.
Le plafond diminue progressivement au fil du temps pour atteindre un objectif de réduction nette des émissions de 62 % par rapport aux niveaux de 2005 d'ici 2030. Cette réduction suit un rythme, appelé "facteur de réduction linéaire", actuellement il est de 4,3 % par an, et passera à 4,4 % entre 2028 et 2030.
Afin d'avoir une unité commune, tous les gaz à effet de serre couverts ont été convertis en un potentiel de réchauffement global (PRG) équivalent au CO2. Le PRG du CO2 est de 1. Le PRG du méthane, par exemple, est d'environ 30. Tous ces gaz sont mesurés en équivalent CO2, de sorte qu'une tonne de méthane correspondrait à 30 tonnes d'équivalent CO2 (CO2-eq).
La fixation d'un prix du carbone encourage la réduction des émissions en attribuant une valeur aux dommages causés par les gaz à effet de serre : chaque tonne de gaz à effet de serre représente un coût.
Ce n'est qu'en associant un coût à chaque tonne de CO2 ou équivalent que les industriels seront véritablement incités à réduire leurs émissions. Avec un prix du carbone, il existe un compromis entre la pollution et la décarbonisation. Plus le prix du carbone augmente, plus le compromis devient favorable à la décarbonisation. Pour y parvenir, il faut toutefois un mécanisme clair d'augmentation des prix, d'où la réduction progressive du plafond (c'est-à-dire de l'offre). Différentes industries investissent dans des solutions de décarbonisation à partir de niveaux de prix différents, en fonction du coût de solutions décarbonées.
La tarification du carbone peut être mise en œuvre via deux systèmes. Une taxe carbone: le prix de la tonne de CO2 est fixé par l'autorité publique. Un marché: le prix est déterminé par l'équilibre entre l'offre et la demande.
L'approche axée sur le marché est plus complexe à mettre en œuvre. Cependant, elle est considérée comme plus juste et efficace, car elle permet d'atteindre les objectifs de réduction d'émissions de manière plus rentable. Le prix du carbone reflétera alors la valeur à laquelle une quantité suffisante d'émissions peut être réduite pour un niveau d'offre donné.
En fixant un prix du carbone, on laisse le marché allouer dynamiquement les efforts de décarbonisation là où ils sont les moins coûteux et les plus efficaces, sans pénaliser excessivement ceux pour qui les solutions de décarbonisation sont trop onéreuses. C'est une approche plus flexible, adaptable et juste qu'une simple taxation uniforme.
Pour détenir des quotas d'émission de l'UE, les entreprises participant au marché des permis carbone doivent les acheter lors d'enchères quotidiennes ou les échanger sur le marché, soit sur des places d’échanges, soit directement entre partis. Certaines entreprises, dans certains secteurs, reçoivent gratuitement une partie des quotas dont elles ont besoin. C'est ce que l'on appelle l'allocation gratuite. Ces allocations gratuites sont progressivement supprimées, ce qui augmentera la motivation à réduire les émissions, car elles devraient atteindre zéro d'ici 2030 pour la plupart des secteurs.
Le mécanisme de plafonnement incite les entreprises à investir dans des stratégies de réduction des émissions, car il exerce une pression sur le prix de chaque quota. Les acteurs du marché s'attendent à ce que les prix futurs soient plus élevés que les prix actuels en raison de la rareté croissante des quotas.
L'un des défis initiaux du marché des permis carbone était de réussir à prédéterminer l'offre de quotas d'émission. Une mauvaise prédiction pourrait mener à un écart important entre l'offre fixée et la demande réelle, comme cela s'est notamment produit après la crise financière et économique de 2008. Cet écart entre l'offre disponible et la demande réelle a créé un excédent d'offre, ce qui a fait baisser les prix. Ce surplus s'est accumulé au fil du temps, menaçant la stabilité de l'ensemble du marché.
Pour remédier à cette situation, le système d’échange de quotas d’émission a mis en place un mécanisme d'ajustement. Ce mécanisme vise à maintenir une tension entre l'offre disponible et la demande réelle. Appelé réserve de stabilité du marché, il absorbe l'excédent d'offre lorsqu'il y a un surplus. S'il y a trop de tension sur le marché, il remet des quotas de réserve sur le marché. Cette mesure permet non seulement d'éviter un surplus de quotas, mais contribue également à un marché du carbone plus stable.
À mesure que de plus en plus d'investisseurs achètent et détiennent des quotas d'émission de carbone, ils réduisent l'offre disponible et "resserrent" le marché. Cela fait ensuite grimper le prix du carbone. Cette hausse des prix incite les industries à réduire leurs émissions, encourageant l'adoption de solutions plus durables.
Le marché des permis carbones donnent un avantage compétitif aux entreprises décarbonées et génère une demande pour leurs produits et services. Cela contribue à créer un transfert de richesse, des entreprises à forte intensité de carbone vers les entreprises à faible émission.
Les quotas européens sont émis par la Commission européenne via des enchères quotidiennes. Les revenus générés par ces enchères sont ensuite reversés aux États membres, qui ont l'obligation d'utiliser ces revenus pour des dépenses liées au climat. Plus le prix des quotas est élevé, plus le financement de projets écologiques climatiques est important.
Le mécanisme de rétention
Lié à l'effet de prix, il existe un "effet de rétention". Chaque quota détenu par un investisseur individuel est un quota retiré du marché pendant toute la durée de détention, et donc indisponible pour les pollueurs
Dans le cadre du mécanisme d'ajustement du marché des quotas de CO2, l'effet d'annulation joue un rôle crucial dans l'équilibre de l'offre disponible. Cela implique l'annulation d'une partie des quotas chaque année, empêchant la suraccumulation de permis et contribuant à stabiliser les prix du carbone sur le marché. La part des quotas annulés dépend du nombre de quotas détenus dans les comptes des acteurs du marché. Par conséquent, plus le nombre de quotas détenus est important, plus le nombre de quotas annulés est élevé.
En investissant dans les quotas aujourd'hui et en les revendant plus tard, nous aplatissons la courbe d'offre. Cela signifie que nous accélérons les efforts maintenant, tout en offrant plus de flexibilité aux générations futures. Cela augmente les chances de succès du marché, en répartissant l'effort plus intelligemment dans le temps et en nous assurant de prendre une longueur d'avance.